jeudi 1 octobre 2015

Chronique : Fluisteraars - Luwte (Eisenwald - 2015)


Difficile pour une formation anonyme de tirer son épingle du jeu lors d’une année remplie de sorties toutes plus excellentes les unes que les autres. Pourtant, les chuchoteurs de Fluisteraars arrivèrent néanmoins à faire parler d’eux en 2014 : en témoignent de nombreuses critiques favorables qu’on peut retrouver sur la toile, toutes convaincues par les répétitions hypnotiques du Black Metal de ces fiers Hollandais.

Quelques mois après la sortie de « Dromers » (« rêveurs »), c’est la surprise : Fluisteraars  a déjà fini d’enregistrer un successeur, ce dernier étant juste en attente de mixage. C’est le 25 septembre 2015 que sort « Luwte », encore une fois chez Eisenwald, petite maison de disque ayant toutefois vu défiler nombre de groupes de Black Metal aux orientations variées, des marécages de Fen à la dépression d’Austere, en passant par les forêts  mystiques d’Agalloch.

« Luwte » : une place à l’abri du vent. Un espace de réflexion et d’expression pourtant chamboulé de l’intérieur par les bourrasques violentes, haineuses et désemparées d’un trio semblant au bord du gouffre. Car si le Black Metal des chuchoteurs fait bien partie d’une mouvance axée sur la mélodie et une lisibilité accrue du résultat final, les riffs pour le moins frénétiques ne font aucun doute : la musique du trio est dominée par la nervosité et les tempêtes personnelles. De ce riffing on retiendra une part de Drudkh, néanmoins en plus racé et moins statique, ancré dans cette envie cathartique du trio d’extérioriser la détresse et la tristesse qui les occupent. « Tout ce qui rien ne contient », « Le dernier répit », « La peur de l’angoisse », autant de titres révélateurs d’un profond mal-être accaparant les esprits des Hollandais, répétant les trémolos mélodiques et tristounets comme un mantra qui les libérerait d’une anxiété maladive ; cette fois-ci sans par contre devenir trop redondant, même lorsqu’un riff se réitère inlassablement pendant 1 ou 2 minutes (« Stille Wateren », « Alles Wat Niets Omvat »), faisant écho à d’autres formations ayant réussi aussi le pari des répétitions hypnotiques.

Mais Fluisteraars serait un peu moins Fluisteraars sans ses mélancoliques interludes et passages atmosphériques, véritables régals pour les amateurs d’un Black Metal très introspectif. Si « Dromers » souffrait parfois de certaines longueurs lors de ces passages (notamment « De Doornen »), « Luwte » corrige le tir et présente une version soignée, plus prenante de ce qui aurait pu se trouver auparavant chez les Hollandais : une fin de piste acoustique accompagnée cette fois-ci par un feedback sale et presque Drone, une interlude mélodique joliment appuyée par cette basse discrète mais indispensable, une autre accompagnée d’une guitare acoustique ; Fluisteraars varie la construction sonique de son monument à l’angoisse avec soin et classe, sans éprouver le besoin inutile de trop faire pour paraître original à tout prix. Ce qui au final est un peu à l’image de la prestation vocale du chanteur : efficace, discrète et presque anonyme, laissant les riffs et ambiances parler d’eux-mêmes afin d’accompagner l’auditeur dans cet espace tumultueux, abrité du vent mais à la merci de ses propres démons.

Thématiquement et musicalement restant dans la même veine que « Dromers », « Luwte » parvient néanmoins à surpasser son prédécesseur sans problèmes aucuns, le groupe ayant compris que seules des répétitions lancinantes ne pouvaient pas suffisamment rassasier les amateurs du premier opus pendant 44 minutes, soit 9 en plus que sur « Dromers ». Plus varié, plus convaincant, mieux produit, « Luwte » est l’exemple même d’un (Post-)Black Metal Atmosphérique terriblement efficace, hypnotique, à la fois extrêmement beau et glaçant.

Lapin


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